Le succès de nos efforts repose sur une variété d’aspects de la culture et de la production de plantes. La température dans la zone racinaire est l’une des caractéristiques les plus souvent ignorées, on la considère rarement comme un aspect de la production. Après tout, cette région est hors de notre vue et on ne peut pas y faire grand-chose. D’ailleurs, n’est-il pas convenable de maintenir une même température pour l’ensemble de la plante? Absolument pas et voici pourquoi!

L’histoire de la température

Pour commencer, la plante se compose de deux parties principales, soit les racines et les pousses, et une intersection que l’on nomme collet. Bien que possédant des matières, des composants et des structures similaires, les racines et les pousses occupent des rôles pour ainsi dire contraires l’un à l’autre. Le collet agit comme une grande centrale de transfert d’appels servant à faciliter le changement de fonctions. Les principes fondamentaux de chimie sont universels. Bien que notre attention soit portée sur la zone racinaire, il faut savoir que les deux autres zones sont aussi touchées.

La racine a comme objectif fondamental de puiser l’eau ainsi que les éléments indispensables au fonctionnement de la plante et accessibles dans la zone racinaire. Les racines servent aussi d’ancrage, de soutien et de stockage; des fonctions qui peuvent s’avérer encore plus importantes que l’assimilation chez certaines plantes. Les racines absorbent l’eau et certains nutriments en s’appuyant sur le principe de base de l’osmose, c’est-à-dire que l’eau traverse une membrane et pénètre les cellules végétales grâce à la différence de concentration ionique de part et d’autre. La plupart des éléments autres que l’eau sont habituellement pompés activement dans les cellules de la plante, ce qui implique une dépense d’énergie.

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Root zone temperature and plant health
Les "pousses" ou la "partie aérienne" correspondent à la partie de la plante qui se trouve au-dessus du sol. Cette zone est capable de contrôler sa température grâce à la transpiration. Les écarts de température peuvent donc y être plus importants et les changements peuvent s’exercer plus rapidement.
La partie souterraine de la plante se nomme "zone racinaire". Elle ne peut pas contrôler sa température. Les écarts de température y sont donc plus petits et les racines doivent rester plus fraîches.

La racine doit se protéger contre l’absorption excessive d’un élément en particulier et la perte des éléments déjà à l’intérieur. Pour y parvenir, elle possède des protecteurs, des barrières et des infrastructures qui correspondent à ses besoins. Les racines ne récoltent pas l’énergie lumineuse, même si, en fait, elles sont de grandes consommatrices de l’énergie dérivée du soleil.

Elles doivent respirer, tirer de l’oxygène (O2), et l’utiliser pour réduire la concentration d’hydrates de carbone produits lors du processus de photosynthèse qui se déroule ailleurs dans la plante, et ainsi libérer de l’énergie pour l’exécution d’autres processus.

Elles n’ont pas besoin de dioxyde de carbone (CO2). Qu’il s’agisse des racines ou des pousses, les réactions chimiques à l’intérieur des cellules des tissus végétaux émettent de la chaleur. Ces réactions requièrent également une certaine température pour pouvoir être déclenchées et poursuivies; lorsque les températures atteignent un niveau trop élevé, les réactions se détraquent. Les racines absorbent l’eau et elles font leur possible pour ne pas la perdre. Comme elles n’ont pas la capacité de se rafraîchir par la transpiration, les racines transfèrent plutôt le surplus de chaleur générée par ces réactions (chaleur latente) vers le support qui les entoure. Les supports denses, comme la terre, le sable et même l’eau, sont dotés d’un grand pouvoir tampon de la température ce qui réduit au minimum les oscillations perçues par les racines dans des conditions naturelles.

Le but fondamental de la partie aérienne est de produire de l’énergie à l’aide du soleil et de créer des organes de fructification afin de transmettre ses gènes. Ce faisant, elle fournit des produits énergétiques et des bases solides sous forme de glucides (hydrates de carbone) au système racinaire afin qu’il puisse continuer de fonctionner et de se développer pour répondre aux demandes de la partie aérienne.

La physiologie des tissus permet à l’eau et aux éléments de se déplacer aussi rapidement que possible des tissus de la plante vers chacune des cellules de celle-ci.

Des systèmes complexes – comme la transpiration qui semble fondamentalement simple, mais qui a recours à un mécanisme incroyablement complexe – ont évolué pour en arriver à transporter les matières premières et les produits finis, à offrir un support ondulé dans la structure des tissus et à faciliter la collecte de l’énergie solaire ainsi que la conversion des éléments simples en molécules organiques complexes. Les réactions chimiques nécessaires au métabolisme et au fonctionnement des cellules sont les mêmes, qu’elles se produisent dans les parties aériennes ou souterraines.

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Lorsque les lumières s’allument, la température ambiante augmente ce qui provoque le réchauffement du sol également. Le sol se réchauffe lentement (il se refroidit lentement aussi lorsque les lumières s’éteignent). Toutefois, l’air n’est pas le seul facteur qui influence la température du sol. La matière, la profondeur (volume) et le taux d’humidité changent également la capacité du sol à dégager ou à retenir la chaleur.

D’autres réactions spécifiques à la conversion de l’énergie lumineuse en énergie chimique se produisent également et une partie des cellules contenues dans les pousses de la plante agissent comme de petites usines chimiques avec une meilleure productivité lorsque les réactions s’exercent plus rapidement. Comme avec les racines, les questions de température demeurent. Les réactions chimiques deviennent hors de contrôle si la température augmente et se ralentissent si la température chute. En y ajoutant la chaleur supplémentaire générée par l’énergie lumineuse, les tissus n’ont d’autres choix que de compter sur un système de contrôle thermique leur permettant de transférer la chaleur dans l’air environnant. L’air en soi est un environnement beaucoup plus propice aux fortes variations de température que les supports plus denses comme la terre.

De plus, les tissus supérieurs utilisent un taux d’oxygène plus ou moins constant, peu importe que ce soit le jour ou la nuit. Ils absorbent du dioxyde de carbone durant la période diurne et le convertit en glucides, éléments vitaux fondamentaux. Tout ceci, la partie aérienne doit le faire en subissant des variations de température potentiellement grandes dans une période de 24 heures. Ces fluctuations peuvent se produire brusquement et varier de 10 degrés Celsius ou plus.

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Voici une micrographie électronique à balayage d’une coupe de la radicelle d’une plante en floraison. Le faisceau vasculaireest formé de xylème (quatre cercles verts, au
centre) et de phloème (bleu). Le xylème transporte l’eau et les nutriments minéraux puisés par les racines vers le reste de la plante alors que le phloème transporte les glucides et les hormones végétales.

Le collet d’une plante représente l’intersection entre les tissus racinaires et les tissus des pousses. Chez certaines plantes, les collets sont clairement définis et ondulés par endroits, tandis que chez d’autres, ils sont difficiles à distinguer et parfois variables. Cette zone est comme une grande centrale de transfert d’appels; elle doit prendre l’eau et les nutriments (sève) sous pression générés par osmose et puisés par les racines pour alimenter un système d’aspiration qui transporte le liquide vers le haut et l’évacue par les puits de transpiration (zones de pression négative) générés dans les tissus des feuilles, changeant donc les propriétés physiques de la sève.

Les réactions chimiques sont effrénées, les températures varient, les systèmes impliqués dans le contrôle thermique subissent un changement et l’oxygène est utilisé en très grande quantité. Le collet se trouve à la jonction entre le support et l’air et le fait de pousser l’intersection trop loin d’un côté ou de l’autre (soit en plantant trop en surface ou trop en profondeur) entraîne son lot de problèmes.

Maintenant, la température dans la partie aérienne, les pousses, doit être adéquate afin que les réactions puissent se produire. La partie aérienne peut ralentir ou accélérer la transpiration afin de maintenir la bonne température dans les tissus de production.

Lorsque les lumières s’allument, la température est basse, donc nul besoin de se rafraîchir. Au fur et à mesure que la journée avance, l’énergie augmente et la température dans l’air et dans les tissus grimpe également ce qui stimule la transpiration qui à son tour s’inverse plus la journée s’achève. La température, par exemple, peut commencer à environ 18 °C et culminer à 29 °C avant d’amorcer sa descente, c’est donc une variation de 11 degrés en une demi-journée seulement. Dans la zone racinaire, la température peut varier de 18 °C à 19 °C, une différence de 1 degré, mais les racines doivent rester fonctionnelles et maintenir une constance afin de fournir tout ce dont les pousses ont besoin, puis n’ont plus besoin, étant donné les changements rapides qu’elles subissent quotidiennement.

Mettre nos connaissances en pratique

Les plantes ont pris des millions d’années pour évoluer et devenir des espèces capables de survivre et de se propager dans des conditions non modifiées dans la nature. La température du sol et ses caractéristiques changent selon la latitude et la composition. Les plantes se sont développées dans des zones précises afin de pouvoir satisfaire les besoins auxquels elles faisaient face pour se reproduire. Le sol, qu’il soit naturel ou artificiel, change sa capacité à évacuer ou à retenir la chaleur en fonction de la matière, de la profondeur (volume) et du taux d’humidité. Les matières très poreuses fluctuent rapidement, tout comme les matières sèches. Les matières denses ou humides permettent de réduire ces fluctuations. Plus on s’enfonce dans le sol, moins les fluctuations sont grandes. Néanmoins, un support fluctue moins rapidement dans toutes ces conditions que dans l’air.

Si le support est confiné à un bac, un jardin surélevé ou un autre type de pot, les fluctuations se feront plus rapidement et intensément et son profil de température s’apparentera à celui de l’air. Dans de telles conditions, le support perd sa capacité à contrôler la température des racines, ce qui réduit le rendement du système racinaire, incapable de satisfaire toutes les exigences de la partie aérienne de la plante. Les plantes dotées d’un système racinaire peu profond doivent vivre avec des écarts de température plus importants, se rapprochant aux moyennes de températures ambiantes de jour et de nuit, tandis que les plantes dotées de racines enfouies en profondeur subissent de plus petites fluctuations et vivent dans des températures plus fraîches que la moyenne.

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Les racines des plantes ne contrôlent pas leur propre température et dès que la température du support sort de la zone optimale pour déclencher les réactions, les racines ne parviennent plus à fournir les bonnes quantités d’éléments au reste de la plante. Ceci se produit, que la température soit trop élevée ou trop basse. Plus la fluctuation de température est grande dans une période de 24 heures, plus on augmente le stress imposé au système racinaire. Un système racinaire stressé augmente proportionnellement l’occurrence de problèmes physiques et pathologiques, ce qui rend la plante plus sensible aux attaques de pathogènes et d’insectes. En plaçant un système racinaire dans un support hors sol, on augmente la superficie par laquelle la chaleur peut pénétrer et s’échapper.

Les plantes se ferment (entrent en dormance) lorsque le système racinaire cesse la majorité de ses activités, que ce soit provoqué par le froid ou la chaleur. C’est ce qui se produit avec les plantes en pot gardées dans les pépinières situées dans des régions chaudes et ensoleillées. En été, les pots se réchauffent avec l’air et les plantes entrent dans une seconde dormance, et ce, même si elles sont arrosées et nourries correctement pour générer une production et une croissance optimales. Même la température de l’eau d’irrigation ou de la solution nutritive augmentera ou réduira les fonctions des racines. Un changement soudain de température provoquera un choc racinaire. Les bons jardiniers réchauffent ou refroidissent l’eau avant d’irriguer afin qu’elle soit à la bonne température.

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Le fonctionnement optimal d’une plante dépend largement de la température et nous n’avons que frôlé le sujet dans le présent article. Le système racinaire et de ramification ont des besoins différents en ce qui a trait à la température: l’un peu fonctionner avec de grands écarts de température se produisant rapidement alors que l’autre requiert fraîcheur, stabilité et fluctuations minimales. Une bonne production de plantes doit prendre tout ceci en considération. Un système racinaire lent nuit au développement de la partie aérienne d’une plante pour toutes sortes de raisons, notamment en compromettant l’absorption des nutriments, la plante perd sa capacité à déclencher des réactions chimiques. De plus, le ralentissement d’absorption se produit plus rapidement avec certains nutriments, ce qui s’observe par l’apparition de carences isolées.

Le développement et les fonctions racinaires sont à leur apogée lorsque les conditions sont maintenues dans un cadre bien précis pour la plante. Un bon horticulteur surveillera et adaptera ces conditions avec la plus grande précision possible, de la même façon qu’il surveillera et contrôlera la température ambiante. Tout ce qui se trouve à l’intérieur d’une plante est relié; si la température racinaire sort des limites acceptables, des problèmes de nutriments peuvent surgir malgré le fait que la plante soit nourrie adéquatement. En outre, une plante compte sur deux environnements différents et entièrement séparés pour survivre et un bon horticulteur portera une attention particulière aux deux.